Dans une lettre ouverte adressée à Dre Diaka SIDIBE, Un Enseignant Chercheur à l’Institut Supérieur des Sciences et de Médecine Vétérinaire (ISSMV) de Dalaba demande à la ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche Scientifique et de l’Innovation de s’inspirer de l’exemple d’engagement du Colonel Mamadi DOUMBOUYA pour sauver l’Université guinéenne.
Universiteactu.com vous propose, ci-dessous, la lettre ouverte de Mamadou Alpha Ghadiry DIALLO :
Madame la ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche Scientifique et de l’Innovation
Madame la ministre, s’il vous plait, sauvez l’université guinéenne
Lettre ouverte à Madame la Ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche Scientifique et de l’Innovation
Madame la ministre, s’il vous plait, sauvez l’université guinéenne !
Je voudrais, avant toute chose, vous exprimer mes sincères félicitations pour votre nomination au poste de ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche Scientifique et de l’Innovation (MESRSI). Nous nous joignons à vous pour adresser nos remerciements au Chef de l’État, Colonel Mamadi Doumbouya pour avoir placé sa confiance en vous. J’ose espérer que vous êtes en mesure d’apprécier la grandeur de votre mission.
Pour paraphraser François-Réné De Chateaubriand, je dirai « pour être la femme de son pays, il faut être la femme de son temps ». Le développement du capital humain s’inscrit comme une pierre angulaire pour tout pays qui aspire à l’émergence. Le monde de l’enseignement supérieur est en pleine mutation. Établir un diagnostic pour connaitre les problèmes dont souffrent nos universités est inéluctable.
Madame la ministre, dans le cadre d’une bonne gouvernance, une de vos priorités serait de lutter contre la sédentarisation et d’assurer la mobilité des Recteurs et Directeurs dans nos Institutions d’Enseignement Supérieur (IES). Nous devons suivre la ligne directrice que le Chef de l’État en l’occurrence le Colonel Mamadi Doumbouya voudrait appliquer à l’Armée Nationale « Personne ne restera plus de trois ans à son poste ».
Nos IES, à l’instar de certains pays de la CEDEAO, doivent disposer donc d’une instance délibérante (conseil d’administration) et d’un exécutif (recteurs et directeurs). Concernant l’exécutif, les directeurs et recteurs doivent être élus par l’ensemble des enseignants-chercheurs de leurs universités ou instituts d’origine. Les conditions de candidature seront bien définies dans les textes régissant nos IES. Cette élection sera entérinée par un décret du Président de la République. Un mandat de trois ans renouvelable une seule fois leur sera accordé.
Leur mission se limitera à l’exécution des décisions prises par le Conseil d’Administration (CA). Dans ce contexte, ils seront obligés de travailler d’arrache-pied à mobiliser la confiance du personnel pour obtenir leur soutien, qui est nécessaire pour la bonne marche de nos IES.
Par rapport aux instances délibérantes, les CA doivent être présidés par des personnes extérieures des IES. Des personnes ressources ayant des compétences dans le cadre de la recherche et la mobilisation des ressources financières. Le président du CA doit être nommé par un décret pour un mandat de 2 ans renouvelable une seule fois. Le vice-président, quant à lui, peut-être élu par ses pairs du CA pour un mandat de 2 ans également renouvelable une seule fois. Les étudiants, les enseignants-chercheurs et le personnel administratif doivent être impliqués pour une meilleure appropriation des décisions.
La réactualisation des textes qui régissent les IES est plus que nécessaire dans un monde en profonde mutation. Il est à rappeler qu’il n’y a même pas de CA digne de ce nom dans nos universités. La gestion des ressources humaines laisse à désirer. Le plan de carrière qui permet une meilleure lisibilité de l’évolution des cadres est inexistant.
Madame la ministre, l’une de vos missions serait de vous atteler à une réforme en profondeur de la gestion de la Recherche dans nos IES. C’est une des missions fondamentales de tout établissement universitaire. Elle est fondamentale aussi pour tout pays qui aspire au développement.
Malheureusement, elle est dans un contexte de précarité sans précédent. Le vrai challenge, de nos jours, est d’arrimer de façon durable la recherche universitaire aux politiques nationales de développement. La recherche universitaire doit apporter des réponses aux problèmes de développement de notre pays. Les IES doivent travailler chacune dans son domaine pour atteindre cet objectif. Madame, je vous recommande d’organiser les états généraux de l’enseignement supérieur et de la recherche pour un meilleur diagnostic.
La formation des formateurs doit être l’un des axes forts du Département sous votre magistère, visant l’amélioration de l’offre de formation dans les établissements de l’enseignement supérieur. Nous avons besoin d’une véritable politique de formation des formateurs. Plus de la moitié des enseignants-chercheurs de nos IES n’ont pas le doctorat (PhD). C’est une situation déplorable qui pourrait être contre-productive et nuire à la qualité des enseignements. Votre Département doit résoudre ce problème dans les meilleurs délais. Les besoins de formations doivent être évalués à travers une étude commanditée par votre Ministère. Les résultats de cette étude vous permettront d’envisager des mesures urgentes pour mettre fin à ce dysfonctionnement pour que nos universités renouent avec l’excellence. Vous devez éviter, en même temps et par tous les moyens, le départ massif des enseignants-chercheurs pour des formations à l’extérieur au risque d’occasionner la fermeture pure et simple de nos universités par manque d’enseignants. Dans le même ordre d’idée, organisez et proposez une offre de formation doctorale ouverte, suffisamment souple pour minorer les contraintes en permettant aux enseignants chercheurs de s’acquitter de leurs charges pédagogiques dans leurs universités d’origine. Par exemple en transformant l’université Gamal Abdoul Nasser de Conakry en « École Doctorale » où tous les enseignants-chercheurs seront invités à valider leur doctorat (PhD) dans un délai de trois ans. Après ce délai, des mesures idoines seront prises à l’encontre des enseignants-chercheurs qui n’ont pas été à la hauteur.
Madame la ministre n’attendez pas la demande ou la revendication des enseignants ou des étudiants, l’introduction de l’internet dans les IES est devenue, depuis l’apparition de la COVID-19, une priorité. Le confinement lors de la crise sanitaire mondiale due au COVID-19 a mis à nu l’enseignement supérieur guinéen. Nos IES ont été incapables d’anticiper et d’apporter une solution pour faciliter la formation des étudiants à distance. La pandémie COVID-19 vient de nous imposer les Techniques de l’Information et de la Communication de l’Enseignement (TICE). La digitalisation de l’enseignement supérieur est inéluctable.
Il est temps d’encourager les enseignants-chercheurs, après une formation, de mettre leurs cours en ligne. Nous devons préparer nos étudiants « à un monde digital ». Ils doivent disposer d’un grand nombre d‘ordinateurs, accessible en permanence, à partir desquels ils peuvent se connecter sur internet pour suivre des formations gratuites à distance, utiliser des logiciels ou visionner des vidéos pour améliorer leurs formations. Il s’agira d’une auto-formation guidée. Toutes nos universités doivent avoir des bibliothèques virtuelles où nos étudiants pourront accéder gratuitement à une documentation bien fournie.
Améliorer le niveau de vie des enseignants-chercheurs est une nécessité. Les enseignants chercheurs se révèlent pourtant indispensables au fonctionnement des universités, qui trouvent un intérêt à leur maintien dans une grande précarité « précarité un jour, précarité toujours ». D’après Bethuel Makosso, de façon générale, la condition enseignante en Afrique est un problème récurrent qui mine la fonction en général et l’enseignement supérieur en particulier puisqu’elle touche aux conditions de vie des enseignants. En effet, le niveau relativement bas des salaires des enseignants et la chute continuelle de leur pouvoir d’achat sont autant de facteurs de démotivation des enseignants qui, de façon naturelle, conduisent ces derniers à privilégier d’autres activités plus rémunératrices.
Madame la ministre, la situation est pire en République de Guinée. Les enseignants ne disposent quasiment d’aucune protection sociale. Beaucoup de vos enseignants-chercheurs sont malades et se retrouvent sans soins appropriés par manque de moyens. De nos jours ils vivent de la générosité de leurs collègues et de leurs familles. C’est une situation inacceptable et déplorable qui doit vous interpeller à plus d’un titre. A mon humble avis, le combat pour la dignité des enseignants-chercheurs en République de Guinée est une nécessité pour revaloriser la fonction. La lutte syndicale au sein des universités, a été détournée de son rôle qu’elle aurait pu jouer dans l’amélioration des conditions de travail et d’étude.
Madame la ministre, il est plus que nécessaire de mener un combat inédit pour obtenir un « statut particulier » pour les enseignants-chercheurs, à l’image de monsieur le ministre Cheikh Sacko pour le Département de la justice au temps de l’ancien régime.
Madame la ministre, avec vous, l’espoir est immense. Vous devez sauver l’université guinéenne comme votre mentor à l’occurrence le chef de l’État, le Colonel Mamadi Doumbouya est en train de le faire pour la Guinée. Gravez votre nom à jamais dans l’histoire de l’enseignement supérieur de notre pays.
Veuillez agréer, Madame la ministre, l’expression de ma très haute considération.
Qu’Allah vous vienne en aide !
Mamadou Alpha Ghadiry Diallo
Ancien boursier de la BID
Enseignant-chercheur à l’ISSMV de Dalaba
Tel : 626 41 12 67
Email : alphalingui@yahoo.fr