Depuis sa création en 2006, l’Université Al Eamar, poursuit son
parcours d’émergence. Première Université Franco-Arabe en Guinée, cet Institut qui sort des sentiers battus a récemment été habilité par l’Autorité Nationale d’Assurance Qualité (ANAQ) à délivrer 7 diplômes.
Dans un entretien accordé à notre rédaction, son Recteur, Dr Mohammad
Abdoulaye BAH aborde avec nous les débuts, le fonctionnement et les
projets en gestation de l’Université.
Pas du tout facile avec des maigres moyens ! Mais avec l’intention de
contribuer à l’édification d’une société débarrassée de toute mauvaise
foi et de tout mauvais comportement, encadreurs et Enseignants de
l’Université Al Eamar, trouvent là un tremplin qui motive chaque
matin. Une bibliothèque regorgeant documents arabes et français, des
salles d’informatique et de classe répondant aux normes, avec environ
400 Étudiants répartis dans cinq filières dont deux en enseignement
général, la première Université Franco-Arabe ne passe pas inaperçue
aux yeux des autorités guinéennes. D’ailleurs cette année, après l’évaluation faite par l’ANAQ, elle a été habilitée à délivrer 7 diplômes.
«Depuis longtemps l’université collabore avec le ministère
de l’Enseignement supérieur. Dans la plupart des activités qu’il
organise, il nous invite. Tous nos programmes, nos diplômes sont
reconnus par le ministère. Ça, c’est avant même la création de l’ANAQ.
Ensuite, pour renforcer notre qualité d’étude, nous avons travaillé
avec une délégation d’évaluation de l’ANAQ, qui est venue nous rencontrer, à sa tête Dr Conté, actuel secrétaire général du ministère
de l’Enseignement supérieur. Donc, on a déposé les documents selon la
demande de l’ANAQ, après l’évaluation ils ont validé, en donnant un avis favorable à l’habilitation de délivrance des diplômes.
Actuellement, on est habilité à délivrer 7 diplômes, il y a
Administration des Affaires, MIAGE (Département Français) ; il y a
Etude islamique, Sciences de l’éducation, Langue arabe (Département
Arabe). Il y a aussi des programmes de master dont un en Finance
islamique et audit, (cours en français) qu’on a créé en partenariat
avec une école internationale de commerce qui se trouve à Dunkerque en France. Il y a aussi le programme master en éducation Langue et
Civilisation arabe là, on a deux programmes un français et l’autre
arabe. Et d’ailleurs pour le master qu’on a lancé en 2019, les
soutenances de la première promotion ont déjà commencé», rappelle Dr
Mohammad Abdoulaye, tout en soulignant qu’ils ont «jugé nécessaire de
commencer par l’habilitation, car c’est ce qui concerne, l’institution
en globalité. L’année prochaine on commencera pour l’accréditation des programmes. Il faut rappeler aussi qu’on a ouvert un BTS de Santé, l’année dernière. Et nous comptons ouvrir d’autres filières selon nos besoins et moyens, inschALLAH».
A Al Eamar on retrouve deux types d’Étudiants ; un premier groupe
issus de l’Enseignement général, qui sont inscrits dans les
départements Français et l’autre venu de l’Enseignement Franco-Arabe
orienté dans les départements Arabes. Comment est-ce que les
encadreurs parviennent-ils à gérer les deux ?
«D’abord concernant la création de cette université, nous avons fait un constat: qu’il y a beaucoup d’étudiants sortants dans les lycées franco-arabes, mais que les bourses étaient très peu en vers les pays arabes. Ils ont fait ce constat avant mon arrivé à la tête de l’université. Donc, ils ont jugé nécessaire de créer cette université pour permettre à ces élèves sortants de ces lycées pour continuer leurs études universitaires chez nous ici en Guinée. Donc ça a commencé par deux filières arabes: il y avait Etudes islamiques et Science de l’éducation. Nous visons à former des cadres qui connaissent leur religion et qui peuvent servir l’Etat. Servir le peuple de Guinée, en toute sincérité, car si on a la foi islamique on n’a pas besoin d’être inspecté, d’être surveiller pour mieux faire notre travail, car on sait qu’ALLAH nous suit, il connait tous nos mouvements et même nos intentions (…) C’est en visant cela que nous avons jugé nécessaire de créer les filaires françaises aussi. Après l’ouverture en 2011 de la filière Administration des Affaires (AA), en 2018, nous avons ouvert deux autres programmes qui sont le MIAGE et la langue arabe. Et donc ce sont ces 5 filières qui sont là actuellement dans les programmes de la licence : on a l’étude islamique, science de l’éducation, la langue arabe, ça ce sont les filières arabes, on Administration des Affaires et MIAGE pour les filières françaises. Il y a deux types d’étudiants ici : il y a ceux sortants des écoles franco-arabes, qui veulent continuer en arabe, eux ils suivent les cours dans les départements arabes. Il y a aussi d’autres étudiants qui sortent des écoles françaises (enseignement général) qui suivent leurs cours soit en AA et ou en MIAGE. Maintenant en ce qui concerne le fonctionnement, il faut dire que la Guinée a beaucoup de cadres. Il y a des cadres qui maitrisent à la fois l’arabe et le français et aussi des cadres qui maitrisent
parfaitement, l’une des langues. On fait appel à tous ces gens-là. On
donne la tâche selon les compétences, c’est comme ça, on évolue ici.
On a plus de 50 enseignants. Il y a 2 à 3 professeurs, entre 17-18
doctorants et 22 détenteurs du master. Donc tous nos enseignants ici
sont soit professeur, docteur ou ont leur master. Et cela dans les
deux départements (français et arabe). On a plus de 400 étudiants,
dans toutes les filières confondues. Avant l’Etat orientait, mais
depuis quelques temps, il ne le fait pas, et ça nous cause des problèmes. Mais DIEU merci, l’université continue d’exister avec le peu de moyen qu’on a, on s’en sort», laisse entendre notre interlocuteur.
Parlant des partenariats de son Université avec certaines
Institutions, Dr Mohammad Abdoulaye BAH, tout en saluant ceux qui
existent, se veut plus large.
«On a des partenariats avec quelques institutions. On s’est tourné vers d’autres sociétés, la BIG (banque islamique de Guinée), il y a SAAR assurance aussi qui a SAAR TAKAFUL. Il y a aussi d’autres banques. Vous savez nous on mise sur l’islam, on a ici un master en finance islamique. Donc, il y a des banques qui souhaitent ouvrir des fenêtres islamiques. On souhaite que des fenêtres islamiques soient élargies dans toutes les banques. Puisque la plupart de nos populations sont musulmanes, il faut appliquer la loi islamique. Il y a aussi le CESAG (centre africain d’étude supérieur en gestion) du Sénégal qui était venu ici, on est même resté ici près d’une semaine. On a commencé de travailler avec eux, mais il y a eu le coup d’Etat qui nous a un peu freinés, mais on va recommencer bientôt. Il y a aussi cette école de commerce international qui se trouve à Dunkerque. Nous comptons élargir notre partenariat selon les moyens et besoins», lance-t-il.
Plus loin, le Recteur reconnait tout de même une bonne collaboration avec
l’ambassade d’Arabie Saoudite en Guinée.
«L’ambassadeur s’est même déplacé à deux reprises ici. Nous aussi, il nous a invités. Et on compte nouer avec d’autres aussi comme les Emirats arabes unis, le Koweït et autres. Ce n’est pas seulement les aides matérielles ; l’argent, mais comment envoyer nos étudiants là-bas pour se former dans plusieurs domaines dont les sciences exactes. Donc, ça fait partie de nos projets. Et notre université est nationale, on souhaite être internationale. Aujourd’hui, nous avons des étudiants qui viennent de la Sierra Leone, et quelques étudiants de la Côte
d’Ivoire. Notre mission aussi c’est servir la société à travers les organisations des colloques, des conférences débats sur des thèmes qui sont liés à la population. On avait même fait le bilan de ça, mais le
covid à tout arrêté. On compte ouvrir les filières de l’université à
l’intérieur du pays. Mamou et Kissidougou, on a ouvert l’étude à
distance pour les filières arabes. On a beaucoup d’étudiants qui suivent à distance», indique-t-il.
En ce qui concerne les réformes engagées ces dernières années,
Mohammad Abdoulaye BAH rappelle: «On insiste à ce que les étudiants
sortants maitrisent trois langues. Tous les samedis sont nommés ici
journée de la langue. L’étudiant qu’il soit dans les filières arabes
ou françaises, apprend l’arabe, le français et l’anglais»,
souligne-t-il. Mais ce n’est pas que ça. Certains projets sont en
gestation: «On à un projet d’ouverture de centre de recherche, cette
année on veut l’ouvrir. Un centre de santé aussi, élargir les filières
françaises aussi ; logistique et transport. Il y a des programmes en
finance aussi, mais tout ça selon les moyens», lâche-t-il.
Et contrairement à ce que pensent certains, «même si tu n’es pas
musulman tu peux suivre les cours ici». «Par exemple, on a même un
étudiant en finance islamique qui n’est pas musulman. On n’a pas de
problème avec ça. Les gens doivent comprendre l’université n’est pas
purement islamique et arabe, c’est ouvert à tout le monde. Il n’est
pas dit qu’il faut être musulman pour venir ici».
L’Université Al Eamar comme toutes les autres du pays, n’est pas en
marge des difficultés.
«L’Etat a arrêté d’orienter vers les privées, ça nous impact négativement. Il y a aussi cette question de finance, nous n’avons pas d’aide, on ne vit que de ce que les étudiants payent. Et comparativement aux autres, vous allez trouver qu’ici ce que les
étudiants payent est moins cher. Et certains étudiants parfois ne
payent pas, on accepte parce qu’on voit réellement ils n’en ont pas,
mais ils ont la volonté d’étudier. Ce qu’on cherche nous, c’est de
payer les enseignants, on ne cherche pas à s’enrichir ou à d’autres
choses. Mais DIEU merci, ça va. Il s’est passé ici à un moment, où on
est resté pendant trois mois sans percevoir nos salaires. Mais DIEU
merci on gère», explique-t-il, avant d’appeler l’Etat et aux bonnes
volontés à assister les étudiants d’Al Eamar. «Nous remercions l’Etat
pour la collaboration, nous sommes souvent conviées à ses activités.
Aux bonnes volontés, on à besoin d’une aide il y a des étudiants qui
veulent continuer leurs études islamiques, mais ils n’ont pas de
moyen. Si on reçoit ces aides, on pourra améliorer de plus les conditions de travail de nos étudiants et surtout faire des bourses à ceux qui en méritent. DIEU Merci, on espère que tout ira bien».
Entretien réalisé par: SOW Telico et A Sadjo Diallo
Tel: 622 98 10 01